Entretien avec Thomas Levet : Première Partie

Par le 10 novembre 2011
email
Print Friendly and PDF

C’est avec un grand bonheur que je vous livre l’entretien que Thomas « MonsieurGolf » Levet a accepté de nous accorder, entre deux avions, alors qu’il rentrait chez lui aux Etats-Unis. Et c’est une interview exclusive, pour vous, lecteurs du blog !

Bonjour Thomas, et merci de nous accorder cette interview !

Bonjour aux lecteurs du blog de Monsieur Golf !

Ta saison a été mouvementée cette année, avec des hauts… très hauts, comme ta victoire à l’Open de France ou la sélection de la France pour la Ryder Cup, et des bas, dont ta blessure à la jambe. Quel est ton secret pour rester toujours de bonne humeur ?

C’est vrai que cette année a été mouvementée ! Il faut se dire que ce n’est qu’un jeu, que de toute façon la vie est faite comme çà, de hauts et de bas. Il ne faut pas se morfondre quand il y a des bas, et ne pas se prendre trop la tête quand on est en haut, car ça monte et ça descend toute sa vie.

Il faut juste faire attention à profiter des bons moments et se dire que les mauvais seront assez courts. Le tout est de garder les pieds sur terre et d’essayer de faire du mieux possible quand on est en compétition !

Tu dois choisir entre représenter la France aux J.O. de 2016, ou jouer pour l’équipe européenne à la Ryder Cup de 2018. Pas le droit au joker ! Alors ?

(rires … puis une longue hésitation)

Alors, je vais vous dire comment on va faire : je jouerai la Ryder Cup en 2018, et je serais remplaçant aux JO de 2016… mais j’y jouerai quand même ! (plus sérieusement) C’est très difficile de répondre, surtout que je serai en fin de carrière, et que ce sera ma dernière chance d’y participer… mais ce sont deux gros objectifs.

L’European Tour et le PGA Tour se tirent régulièrement dans les pattes, quand il s’agit d’attirer les meilleurs joueurs sur leurs circuits respectifs, et parfois au détriment des joueurs (quota de tournois, calendrier démentiel). La création d’un circuit mondial unique serait-elle une bonne chose pour le golf ?

Actuellement, nous avons des circuits très établis, qui n’ont pas envie de partir de chez eux, et particulièrement le PGA Tour. Il y a une forte concurrence, mais le fait nouveau est que l’Europe a les meilleurs joueurs de son coté, bien qu’ayant un circuit plus faible. Et ces joueurs là savent très bien qu’économiquement, ils ont intérêt à garder un pied en Europe, compte tenu de la couverture médiatique et des retombées plus faibles dont ils bénéficient aux Etats-Unis.

Le cas le plus flagrant concerne l’élection du joueur de l’année : d’habitude, c’est décidé le lendemain du dernier tournoi… mais le problème est que c’est un anglais (Luke Donald) qui gagne tout ! Et les américains, ça les “saoule” ! Ça fait 15 ans qu’ils élisent l’un des leurs (ndlr : en fait, il y a eu 5 non- américains en 20 ans), mais là c’est un anglais en tête, suivi d’un irlandais (Rory McIlroy), qui a gagné leur US Open en plus ! Alors il essaient de faire passer la “pilule” Keegan Bradley, qui a aussi gagné deux tournois cette année. Ils sont très, très protectionnistes.

Et la création d’un circuit mondial impliquerait des critères de sélection stricts, qui pourraient amener l’Europe et les Etats-Unis à se déchirer comme jamais… alors je ne sais pas si c’est une bonne chose pour le golf. Mais pour les joueurs, ce serait bien ! Cela permettrait à plus de monde d’accéder aux gros tournois, alors qu’actuellement, même si on les appelle des Open, il n’en ont plus que le nom. Ils sont réservés à des catégories précises de joueurs, et si l’on ne fait pas partie des deux circuits principaux, on n’a quasiment aucune chance de les jouer.

Tu n’as pas de coach attitré, mais certains aspects de ton jeu doivent nécessiter d’être entretenus régulièrement… comment les travailles-tu ?

Je m’entraîne seul, pour la bonne raison que la seule personne qui voit tous les coups que je tape dans l’année, qui sait comment je les approche psychologiquement, et qui sait comment j’ai loupé ou réussi certains coups, c’est moi et moi seul !

Ce que j’essaie de faire, c’est de progresser petit à petit, zone par zone, coup par coup, et voir comment ça évolue. J’essaie de faire en sorte que dans les moments ou je ne joue vraiment pas bien dans un compartiment de jeu, ce soit vraiment relatif et sans trop d’incidence sur le score.

Dans la relation entre un coach et un joueur, on peut être amené à toujours rechercher la perfection, et cette quête peut parfois te faire régresser.

Je vois qu’il y a des joueurs qui se gâchent pendant des années en essayant de changer radicalement de swing : on peut parler du “cas” Padraig Harrington, qui tente depuis plus de deux ans de s’approprier un nouveau swing. Il avait gagné trois majeurs avant ça, et ça l’a amené nulle part : il n’a pas gagné un tournoi depuis (ndlr : il a d’ailleurs mis un terme à sa collaboration avec son coach Sam Torrance en Juillet 2011) C’est ça le danger de changer de coach et d’idées, on peut s’y perdre totalement. Alors qu’avec ma façon de travailler, en étant seul et en travaillant petit à petit, ça me permet d’évoluer tout en restant à l’aise dans mon jeu.

Quel est le compartiment de jeu sur lequel tu peux t’appuyer quand tu es sous pression ?

Cela dépend vraiment du moment du tournoi. Si je suis à la lutte pour un cut, je sais que le long jeu sera mon parachute, et qu’il peut me sauver. En revanche, si je suis “à la gagne” pour un tournoi, c’est le putting qui va m’y emmener. Dans ce secteur-là, je peux être le plus mauvais au monde… mais je peux aussi être le meilleur, et ça je le sais ! Quand je suis bien placé pour la victoire, en général, c’est parce que je putte très bien. Et là je deviens dangereux… et c’est pour ça que j’arrive à gagner un tournoi de temps en temps !

Effectivement, il peut arriver que tu te plaignes de ton putting sur Twitter ! Donnes-tu un petit nom à ton putter actuel ?

Des noms d’oiseau, parfois !

“Si tu devais choisir un joueur de golf …”

… comme équipier de Foursome en Ryder Cup ?

Lee Westwood, car il ne loupe pas un coup, alors ce ne serait pas un problème de jouer avec lui en foursome !

… à qui emprunter le carnet de parcours, en vue du prochain majeur que tu jouerais ?

Tiger Woods, c’est le joueur qui a le plus de stratégie sur un parcours.

… pour aller boire une coupe de champagne (ou une guinness) un soir de victoire ?

John Daly … il s’y connait !

… pour te raconter une bonne blague ?

Tony Johnstone (ndlr : golfeur zimbabwaéen)

… et d’ailleurs, tu nous la racontes ?

Il en a fait une a Severiano Ballesteros qui était monumentale !

Ils jouaient ensemble à l’Open d’Espagne, et Ballesteros était le promoteur du Tournoi. Sur le trou 15, ils slicent leur drives tous les deux dans la forêt, à 15m l’un de l’autre. Tony Johnstone s’approche de la deuxième balle, derrière un arbre, prend un stance abracadabrant d’à peu près 2m50 de large qui lui met le pied sur un terrain en réparation. Severiano avait bénéficié de 4 “rulings” en sa faveur au cours du même tournoi. Tony lui demande :

– Si je m’installe comme ça et que j’essaie de jouer une balle en cut, je suis géné par le terrain, ai-je droit à un free drop ?

– Euh non Tony, répondit Severiano, tu comprends… tu ne prends pas un stance normal !

Johnstone change alors de stance et demande à l’espagnol :

– Et si, de cette position, j’essaie de jouer en slice, je suis gêné par la tour de télé là-bas au fond, ai-je droit à un free drop ? Ballesteros rétorque :

– Ah non Tony, tu comprends, il faut que la tour télé soit dans la ligne directe entre ta balle et le drapeau, là tu passerais à 50m à gauche, ce n’est pas possible !

Et Tony Johnstone de répliquer :

– Et bien c’est bon à savoir, Seve, parce ce que là, c’est TA balle !!

Un grand merci à Thomas “MonsieurGolf” Levet pour cette première partie d’interview ! Dans la  seconde partie, nous parlerons de matériel et de la place du golf en France. Elle paraîtra la semaine prochaine sur le blog … et d’ici là, bon golf !

A propos de Rédaction Monsieurgolf

1 Commentaire

  1. Pingback: Entretien avec Thomas Levet : deuxième partie | le blog de monsieurgolf

vos réactions nous intéressent, laissez-nous un commentaire :

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.